La Sophrologie
dans la gestion du stress, quels enjeux
? Auteur : Dimitri Jacques, sophrologue-relaxologue
C’est caractéristique de notre société
dominée par le mental : elle croit connaître
les choses à en parler et en donner des
explications. Or certaines choses se vivent
avec le corps, et c’est bien notre individu
tout entier que le stress interroge.
Le stress est-il,
comme on l’entend, le mal du siècle ?
On en parle beaucoup en effet mais à la
surface des choses, la plupart des gens
se méprennent sur la nature intrinsèque
du phénomène. Le stress est en soi quelque
chose de positif, puisqu’il nous permet
de mobiliser nos capacités pour réagir
à une situation qui présente un enjeu
particulier et la dépasser.
C’est l’intensité mais surtout la durée
de la situation stressante qui va conduire
à l’épuisement et à la maladie. Les agressions
répétées de la vie sociale ne nous laissent
pas le recul suffisant pour appréhender
les problématiques qu’elles soulèvent,
et moins encore pour leur apporter une
solution adaptée. Comme la demande devient
permanente, les muscles restent tendus,
l’esprit reste alerte, beaucoup d’énergie
est sur le départ sans pouvoir être libérée.
Il faut bien comprendre qu’une pathologie
du stress ne s’attrape comme un mauvais
rhume, c’est le signe d’une profonde disharmonie
entre l’individu et son milieu de vie.
A quel moment
faire appel à la sophrologie ?
D’abord, n’oublions pas que la vocation
première de cette discipline est préventive.
Il n’y a aucune honte à venir apprendre
à se détendre, sans attendre les rappels
à l’ordre de notre corps. J’entends trop
souvent « je n’ai pas le temps », avec
ce mélange indéfinissable de dépit et
de fierté, qui est la marque flagrante
de notre mental en train de fuir le présent.
Nous préférons nous projeter sans cesse
dans un avenir hypothétique, ce qui nous
oblige à gérer mille préoccupations et
nous évite d’être confrontés à notre réalité
dans l’instant.
Ceci étant dit, il est évident que dès
qu’un état de mal-être est suffisamment
installé pour entraver les relations sociales
(travail, couple), il ne faut plus se
poser de question. La palette de symptômes
est aussi large que connue, mais le rapprochement
avec la situation stressante n’est pas
toujours fait : mauvais sommeil, fatigue
anormale, douleurs musculaires sans cause
biologique connue, anxiété, irritabilité,
grande difficulté à maintenir l’attention,
perte de l’estime de soi, pensées en boucle,
peurs, perte des moyens et sentiment d’impuissance…
Cela peut-il
éviter d’aller chez le médecin ?
Nous évoluons dans le monde du bien-être
qui, comme les deux faces d’une pièce,
est indissociable de la santé. Tout ce
qui contribue à bonne hygiène de vie et
une relation d’équilibre avec son environnement
diminue fortement les risques de tomber
malade, ce n’est un secret pour personne.
Les techniques de sophrologie ne remplacent
pas un traitement médical mais peuvent
en améliorer l’efficacité, un patient
plus détendu est en général plus réceptif.
Pour ceux qui souffrent de maladies chroniques
ou sont engagées dans un processus thérapeutique
éprouvant, elles aident à évacuer les
tensions et les schémas négatifs qui empêchent
l’organisme de mobiliser ses défenses.
Jusqu’où peuvent aller les conséquences
du stress ?
Il est évident que cette énergie que
nous refoulons doit aller quelque part. Elle va se déverser dans notre organisme
et peut finir par y provoquer des dégâts.
Un corps abandonné aux désordres physiologiques
n’est plus en mesure de se défendre correctement
contre les maladies de toute sorte, il
offre même un terrain favorable à leur
développement. Peuvent survenir des maladies
de dégénérescence comme le cancer, une
dépression bien sûr, et aussi des lésions
cérébrales qui peuvent déboucher sur une
schizophrénie.
Mais il y a quelque chose de plus profond.
Notre société s’est réfugiée dans sa tête,
dans les mots et les constructions mentales,
et le corps n’est plus qu’un outil encombrant
qui n’a qu’à bien se tenir. Or, nous assistons
à un développement sans précédent de maladies
comme l’anorexie ou les troubles borderline,
où le mouvement incessant des pensées
fait rage, les émotions ne trouvent plus
à se dire et le corps n’est plus perçu
correctement. Tous les dysfonctionnements
que j’ai rencontré chez les patients sont
d’essence courante chez l’homme occidental,
je dirais même ironiquement qu’ils le
définissent. Cela devrait nous interpeller
sur l’aboutissement d’un mode de vie contre-nature.
Je crayonne actuellement un bouquin sur
ce thème.
Que peut bien
apporter la sophrologie arrivé à ce stade
?
L’objectif est clairement de se réapproprier
sa réalité, de reconquérir son corps et
de devenir conscient de ce qui s’y passe. Au-delà du traitement médical qu’on lui
applique, cela permet de donner un sens
à la maladie. La souffrance est l’énergie
des intentions inaccomplies, de ce qui
n’a pas trouvé à se dire. Cette énergie
qui parcoure et épuise l’individu est
souvent entretenue par des pensées obsessionnelles
et des projections morbides qui tournent
à la haine de soi.
J’ai constaté dans ma pratique que cette
énergie peut être stoppée dans le présent.
En vivant intensément et avec tout son
corps l’instant présent, il est possible
de déposer son fardeau et d’accéder à
nouveau à ses ressources intérieures.
En somme rien de nouveau sous le soleil,
car tout cela rejoint par exemple les
enseignements de la chine antique, nous
ne faisons que les redécouvrir avec la
science d’aujourd’hui (cf "La solution
intérieure" du Dr Thierry Janssen aux
éditions Fayard).
En quelques
mots, en quoi consiste la sophrologie
?
La sophrologie est issue du rapprochement
des médecines traditionnelles orientales,
et d’approches plus récentes empruntées
à la psychologie occidentale, à notre
connaissance du cerveau et de la physiologie
humaine. C’est donc une méthode de synthèse
qui n’invente rien mais qui constitue
peut-être la première approche réellement
globale de l’individu proposée en occident.
Par des mouvements respiratoires, des
exercices de relaxation, de méditation
guidée ou des suggestions auto-hypnotiques,
on cherche à obtenir un état de conscience
qui permet de voir ce qui se passe au-delà
du rideau des pensées.
Beaucoup de techniques sont efficaces
pour modérer son stress mais je préfère
toujours m’attaquer aux causes, et viser
le rétablissement de l’harmonie dont l’altération
créé ces perturbations. Il existe aussi
des méthodes d’approfondissement, comme
la sophro-analyse qui permet une exploration
du vécu intra-utérin et de faire ressortir
des conditionnements inconscients.
Dans tous les cas, le vécu corporel
est intimement lié aux questions psychologiques,
notre corps ne ment jamais.
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